mardi 11 septembre 2007

Bienvenue sous la tente ocre

Le Marabout-président



De L’avis de tous ceux, y compris les étrangers, qui ont rencontré le Président Sidi ould Cheikh Abdallahi, le sentiment est le même : c’est un homme affable, qui vous écoute attentivement qui ne vous interrompe jamais et qui vous donne cette impression de tranquillité. Ses gestes sont mesurés et posés. Il interroge plus qu’il n’expose avec un sens de la mesure donnant à celui qui l’écoute cette impression qu’il a toujours bien répondu a ses interrogations. Tous ceux qui ont rencontré Sidi ould cheikh Abdallahi, sont repartis avec la ferme conviction qu’il y avait chez cet homme une qualité réelle de conciliation et un vouloir inné de ne point irriter.

Un homme sage qui cherche dans la satisfaction de certains la satisfaction de tous. Satisfaire tout le monde sans irriter personne. Parler sans aller au-delà de ce qui peut être dit , se suffire de faire comprendre. A la profusion de mots il préfère le peu de mots justes. Aux mots qui dérangent, ceux qui concilient . Et quand chacun y va de ses doléances, il rencontre l’avis d’un interlocuteur qui lui laisse de l’espoir en de jours meilleurs.

En replaçant toutes ses remarques dans leur contexte socioculturel mauritanien, Sidi ould Cheikh Abdallahi, apparaît comme l’envers d’une image d’Epinal : un Marabout sous une tente ocre. Avec lui, comme on sied à le dire dans les grandes zouaya, la présidence est une « tente de grande famille ».

Sidi Ould Cheikh Abdallahi dispose de qualités certaines qui sont sans conteste, en diplomatie, un atout majeur, mais le sont elles dans la gestion de l’Etat ?

La conciliation d’intérêts est une œuvre que justifient les relations humaines, elle est souvent utile dans les arbitrages de groupes, de personnes, d’autorités mais elle devient inefficace sinon même dangereuse dans la gestion publique. Les acteurs de la gestion publique ont besoin d’ordre et de commandement, de fermeté dans la direction et de choix solides dans les hommes et les objectifs. Ils ont besoin de sécurité tant dans leur encadrement que dans la constance et l’unicité de la prise de décision. En somme, une rigidité à l’image des outils qu’ils utilisent.

Il est impossible de gérer l’Etat en recherchant de façon permanente la conciliation. Toute volonté de gouverner nécessite au préalable d’avoir choisi un option de développement. Un programme politique visant à appréhender, en fonction de la vision du leader politique et l’idéologie qui le guide, tous les secteurs de la vie sociale, politique et économique. En somme un programme à exécuter et à défendre. Et l’on voit bien dans cette optique que la conciliation doit servir ce programme et non l’annihiler en gérant de façon continue, à travers une recherche permanente de conciliation, les conditionnalités et les résistances posées par les autres forces politiques de l’opposition notamment.

En ce domaine Sidi Ould Cheikh Abdallahi, pèche par excès, il veut gouverner l’Etat dans une paix institutionnelle qui éviterait les frictions politiques en associant à ses efforts toute force contraire. C’est la raison pour laquelle ceux-là même qui devaient jouer avec des forces institutionnelles, un contre-pouvoir à savoir les partis d’opposition se sont mis à rechercher un « gouvernement d’unité nationale ». La personnalité du nouveau locataire du palais ocre s’y prêtait à merveille. C’était cependant sans compter sur les engagements qu’en homme d’honneur Sidi Ould Cheikh Abdallahi a pris à l’égard de ceux qui l’on soutenu. La droiture sans concession, voilà encore une qualité de cet homme qui l’empêche d’aller à contre-courant de ses engagements même s’ils sont en contradiction avec les intérêts de la gestion publique. Les nominations fort contestables et critiquées par un pan non négligeable de la classe politique et de l’intelligentsia, illustrent dramatiquement bien cette difficulté pour cet homme à arbitrer entre l’intérêt d’un groupe qui l’a soutenu et l’intérêt d’une nation qui a voté pour lui. Arbitrage qui met en balance la personnalité de l’homme de principes pour qui le respect de la parole donnée est sacré et le statut de l’homme d’Etat pour qui l’intérêt de tous doit primer l’intérêt de quelques uns. Et la balance pencha dans le sens que l’on sait.

Aujourd’hui, l’Etat Mauritanien ne souffre pas de son président, il souffre d’un état d’esprit, d’une forme de gouvernance « molle » qui s’affaisse sous le poids d’une gestion publique minée par les défauts hérités.

L’attitude conciliante du Président dans la gestion des affaires publiques trouverait son impact favorable dans un terroir politico-institutionnel spécifique. A savoir un régime traditionnellement démocratique ayant développé des us et coutumes d’une gestion saine et contrôlée et où la responsabilité des agents publics et hauts commis de l’Etat est passée en force de chose partagée et où le respect des lois prime l’intérêt personnel, tribal et clanique.
Or l’Etat mauritanien ne répondant pas par définition à cette description que se passera-t-il si le président persévère dans la gestion conciliante des intérêts publics ?

Outre la lenteur déjà fortement remarquée dans le processus de décision publique, s’ajoutera une complexité qui prendra sa source dans la tendance naturellement héritée d’un régime de gabegie, de profiter au maximum de l’inexpérience politique des décideurs. Ainsi, profitant d’une volonté conciliatrice, toute décision défavorable à leurs intérêts est présentée par des lobbies constitués comme vitale et doit suivre le méandres des consultations des acteurs sociopolitiques avec ce que cela entrainera comme lenteurs et blocages.
Cependant ce qui est certain, c’est que le Président Sidi Ould Cheikh Abdallahi gère l’Etat à sa manière. Lente, conciliatrice à l’excès ou conciliante des intérêts, il n’en demeure pas moins qu’il a cette qualité de gérer en son âme et conscience.

Avec le temps changera-t-il de stratégie ? Nul ne le sait. Mais ce qui à craindre n’est pas vraiment ce que la nature profondément honnête de cet homme puisse imprimer à la gestion de l’Etat, c’est plutôt ce que la nature profondément malhonnête de certains pourrait, malgré lui, lui faire faire contre son âme et conscience.

Pr ELY Mustapha
* La peinture illustrative s'intitule "l'échiquier" est du peintre Francis Boutleux. Son site: http://boutexpo.free.fr/gallery/

8 commentaires:

  1. prof,

    Le marabout est dans une tente encerclée. Il faut lui venir en aide.

    Diabira

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  2. Tout ça pour lui! C'est pas mérité. attention au culte de la personnalité

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  3. prof ELY,

    En tout cas avec tout ce qu'on a lu sur son comportement et sur son assujetissement à certains membres de son entourage, il ya beaucoup de vérité dans ce que vous dites prof.
    Mais je ne crois pas que votre voeu pour qu'il s'en sorte peut se réaliser avec tout cette mafia autour de lui comme a dit le posteur précédant Diabira il est vraiment encerclé.

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  4. tu rejoins tes confreres mauritaniens applaudisseurs et chanteurs des louanges, pour beneficier des largesses du roi.

    ça c'est le probleme de nos intellectuels toujours aveugles par leurs ambitions personnelles et que la mauritanie aille aux diables.

    cher prof ce dont sidioca a besoin ce ne sont pas ses louanges, mais plutot ceux qui le critiquent et qui l'aident à gouverner la mauritanie en le soutenant quant il le faut et en lui disant non au moment qu'il le faut.

    de ce qu'il etait, de son comportement egalement on s'en fout. mais nous serons la pour le juger de ses actes et toi aussi


    abdellahi ould soueilem

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  5. Cher Abdallahi ould Soueilim,

    Bonsoir,

    Outre que vous ne semblez pas avoir saisi l’essence de cet article, vous me connaissez très mal.

    D’abord, Il ne s’agit ni plus ni moins que de fixer l’image d’un homme qui gouverne. Son tempérament et sa nature. Et comment les autres l’ont perçu. Et de cette image comment tirer des conclusions rationnelles qui expliquent ses difficultés à gouverner (retard dans la prise de décision, volonté de concilier les intérêts divergents etc.) face à une gestion publique qui a des exigences souvent opposées (rapidité, efficacité, commandement).
    En somme analyser le tempérament d’un homme et son influence sur le mode de gouvernance.

    C’est une approche de science politique , pas une approche de courtisan. Vous auriez dû en tirer la conclusion vous-mêmes.

    Or les conclusions que vous en tirez son éminemment négatives.
    Ne me dîtes pas que vous êtes de ceux qui pensent que tous ceux qui écrivent un mot sur les autres sont sensés en attendre un geste en retour ?

    Soyez positifs et dîtes-vous qu’il y a aussi ceux qui écrivent pour éclairer, en leur âme et conscience, leurs concitoyens et le monde et qu’il sont dans une situation professionnelle et matérielle bien meilleure que celle que peut leur offrir un quelconque gouvernement mauritanien et que ce qu’ils attendent en retour ce n’est ni des honneurs académiques, ni des postes hautement rémunérés qu’ils ont déjà , mais simplement un peu de bonne foi de leurs compatriotes, dont vous êtes.

    Fraternellement

    Pr ELY Mustapha

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  6. merci prof pour les eclaircissements qui m'ont largement touchés et qui sincerement emanent d'une grande personne digne de ce titre.


    abdellahi ould soueilem

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  7. je crois que nous avons un président par procuration. En effet, il ne dirige pas, il est dirigé par d'autres forces...

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  8. Cher Abdallahi,

    Vous êtes toujours le bienvenu dans cet espace de discussion et de dialogue.

    Fraternellement

    Pr ELY Mustapha

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Bienvenue,

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Pr ELY Mustapha

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Poésie de la douleur.