dimanche 14 septembre 2008

Le général limogé ou la solution à la crise

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Qui t’a fait général mon général ?

Le général putschiste, qui ne dormait pas beaucoup, trouvait toujours au pied de son lit le général limogé qui ronflait paisiblement. Et depuis le 6 Avril 2008, qu’il apparut à ses côtés et ne le lâchait pas d’une botte, il l’ignorait toujours.

Chaque matin, il l’enjambait pour allait vaquer à ses occupations de putschiste. Mais la présence de ce général limogé, en tout point son image, le gênait énormément. Il le suivait partout. Pendant qu’il recevait en queue leu-leu ses applaudisseurs, il l’apercevait souriant du coin des lèvres. Un sourire narquois qui semblait dire « ils t’applaudiront, tu les nommeras et ils se retourneront contre toi dès qu’un autre prendra ta place ».

Mais la remarque que ce général limogé fit le jour suivant le putsch, l’avait sorti de ses gonds. Il était allé rencontrer ses applaudisseurs devant les grilles du palais et alors que les « vive mon général » fusaient de partout, le général limogé s’était penché à son oreille et lui a soufflé : « Qui t’a fait général, mon général ? ».

Depuis ce jour, il le détestait profondément et chaque fois, qu’il le trouve ronflant au pied de son lit, il l’enjambe pour aller remplir son devoir de putschiste.
Le suivant partout comme son ombre, il ne savait pas comment s’en débarrasser. Son sourire narquois, ses remarques désobligeantes du genre : « M’barré ne s’est pas barré, Ould Boulkheir est derrière, Sidioca c’est par là… ould Maouloud fait des coudes… Sarkozy a des fusils …Bush veut tes babouches…etc.» .

Bref, ce général limogé lui rendait la vie difficile et aujourd’hui , il décida d’en finir. Au lieu de l’enjamber, il décida pour la première fois de lui adresser la parole.

Après lui avoir asséné un grand coup de botte dans les côtes, il lui dit : « Dis-moi, combien de temps vas-tu encore continuer à me hanter l’esprit ? »

Le général limogé : « Tu sais, moi je suis tranquille. J’ai été limogé en militaire respectueux des institutions et des prérogatives du chef suprême des armées, j’ai accepté mon sort. Je me la coule douce au pays des limogés. Alors que toi tu te débats pour être autre chose que ce que tu n’es ou que ce que tu devrais être. »

Le général putschiste : « Qu’est-ce que cela signifie ? »

Le général limogé : « Tu es un militaire au service de la Nation. Ta place est dans les casernes pour défendre le territoire et l’intégrité du pays et non pas en train de mettre tout un pays dans une crise aux conséquences inéluctables parce que tes ambitions dépassent ta fonction. Tu as hérité de tes prédécesseurs cette attitude putschiste pensant que l’Etat et la Nation appartiennent aux militaires et tu continues à perpétuer cette infamie. Sans penser à ses conséquences. »

Le général putschiste : « Tu crois que j’aurai dû accepter sans broncher que ce vieil homme que l’on a placé à la tête de l’Etat, me limoge ? On l’avait placé pour gérer nos intérêts et il s’est retourné contre nous. Il n’a que ce qu’il mérite. C’est un ingrat. Au lieu de continuer à jouir paisiblement de son statut de Président, à faire ses voyages tranquillement, à bénéficier de tous ses avantages et de ses émoluments en nous laissant décider du reste, le voilà qu’il découvre l’utilisation abusive des décrets… »

Le général limogé : « Le problème à mon avis, n’est pas le président, le problème maintenant c’est toi. Vous êtes tous les deux en résidences surveillées. La tienne est juste un peu plus vaste….. Crois-tu sincèrement que tu as des chances de t’en sortir ? »

Le général putschiste : « Ma stratégie est d’essayer d’acquérir le plus de monde à ma cause et d’essouffler avec le temps la communauté internationale. Quand aux opposants de l’intérieur, ils sont plus accessibles… »

Le général limogé : « Là tu te trompes, car les émissaires occidentaux te l’on bien fait savoir. Tu ne resteras pas au pouvoir. Le retour à la légalité, tu vas y arriver et qu’est-ce qu’il adviendra de toi ? »

Le général putschiste : « C’est vrai que c’est un os, et tous ceux que j’ai nommés en grandes pompes pour convaincre le monde de la justesse de ma cause, ont été inéfficaces. Juste Wade, nous a refilé un petit coup de main…et là encore. »

Le général limogé : « Tu n’as pas répondu à ma question : Qu’adviendra-t-il de toi ? »
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Le général putschiste (souriant): « Et qu’adviendra-t-il de tout ce beau monde que j’ai nommé ? »

Le général limogé : « Tu penses certainement à une solution. Laquelle ?»

Le général putschiste : « Si je ne peux pas rester alors le Président ne reviendra pas non plus ! »

Le général limogé : « Tu penses que ce serait une défaite pour toi que le Président revenait. C’est compréhensible. Mais y a –t-il une autre solution ?»

Le général putschiste : « Nous avons prévu des journées de concertation et des élections… »

Le général limogé : « Allons cesse de me mener en bateau, je suis ta conscience et tu ne peux me tromper. Les journées de concertation, c’est de la poudre aux yeux. Le CMJD en avait déjà rempli sa besace et personne n’y croit plus. Quant aux élections, tu sais bien que la communauté internationale a dit non. Et qu’elle réclame un retour immédiat à la légalité. La question des élections, il faut l’oublier… Les ambassadeurs occidentaux et les missives des organisations internationales te l’ont bien fait savoir…»

Le général putschiste : « Franchement, tu veux que je te dise, je souhaite que tout cela se termine vite...As-tu une solution ? »

Le général limogé : Raisonnons logiquement. Toi, tu sais que tu ne peux pas rester, mais tu ne veux pas que sidi revienne. Sidi veut revenir. La communauté internationale t’oblige à restaurer la légalité. Les partisans du retour de Sidi sont intransigeants. Ceux qui ne veulent pas du retour de Sidi le sont autant. Donc la solution ne peut être que mi-figue mi-raisin.
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Le général putschiste : « Mi-figue, mi-raisin ? »

Le général limogé : « Etant donné que désormais la seule voie possible est le retour à la légalité. Il n’y a que deux solutions. La première solution: Le retour à la légalité, mais sans toi et sans sidi. La seconde solution : le retour de la légalité, avec toi et avec Sidi. »

Le général putschiste : « En effet, comment peut-on envisager cela ? »

Le général limogé : La première solution consiste en ce que toi tu décides de quitter le pouvoir en confiant le pouvoir à une autorité constitutionnelle pouvant organiser des élections dans les plus brefs délais. L’autorité la plus indiquée constitutionnellement est bien entendu le Président du Sénat, qui gérerait les affaires courantes en faisant revenir le gouvernement légal et organiserait les élections présidentielles dans les délais prévus par la constitution en cas d’empêchement du Président de la République….C’est une solution envisageable, mais il y a un problème. Outre les multiples oppositions dont certainement celle qu’affichera l’actuel Président du Sénat à une telle solution, il faut dire qu’il y a une grave entrave : la séquestration du Président de la République par un putschiste, ne fait pas partie des cas d’empêchement prévus par la constitution. C’est donc une solution caduque.»

Le général putschiste : « Et la seconde solution ? »

Le général limogé : « La seconde solution : Le retour à la légalité avec toi et Sidi. Sidioca est réinvesti dans ses fonctions, avec à la clef des décrets d’amnistie des putschistes et de leur nomination à des emplois préservant leurs grades et leurs avantages éloignés du centre de décision politique. Un projet de réforme de la constitution sera élaboré. Sidi dissoudra l’Assemblée nationale convoquera des élections législatives et demandera au gouvernement de déposer sa démission et de gérer les affaires courantes en attendant l’élection d’une nouvelle Assemblée parlementaire. Il réélira un nouveau premier ministre et un gouvernement emportant le consensus de la Nouvelle Assemblée. Un référendum est organisé après consultation préalable des acteurs politiques sur un projet de révision de la constitution dans le sens de l’équilibre des pouvoir entre les autorités exécutives et législatives. »

Le général putschiste : « Et moi que vais-je devenir ? »

Le général limogé : « Mais toi tu fais partie des putschistes non ? »

Le général putschiste : « Mais dans ta solution, moi je vais partir et sidi va rester...»

Le général limogé : « Pas exactement. Tu pourras choisir un poste qui conviendrait à tes ambitions politiques…N’es-tu pas en train de créer ton propre parti politique ? »

Le général putschiste : « Quel poste alors ? Dis-moi. »

Le général limogé : « Leader de l’opposition »

Le général putschiste éclata de rire (ce qui, à voir ses photos dans les journaux, ne lui était pas arrivé depuis le 6 août 2008). Ce n’était pas une mauvaise idée, se dit-il alors.
Mais il se retrouva tout-à-coup tout seul. Le général limogé avait soudain disparu. Il ne restait plus que le Général putschiste qui avait repris ... (sa) conscience.
Seul un écho résonnait encore dans le vaste palais : « Qui t’a fait général, mon général ? »
Auquel répondait un autre écho : « Qui t’a fait président, mon président ? »

Pr ELY Mustapha

2 commentaires:

  1. excellent prof, comme toujours depuis toujours

    Et si on prenait cet ecrit comme scenario d'un film ou d'une piece de theatre tragi-comique? ca fera un tabac, je le jure!
    B@

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  2. استاذي العزيز تحليل سليم كما عودتنا لكن استاذي الا ترون ان مشكلتنا في غياب الثقافة السياسية لدى مسؤولينا؟ الم يكن من الممكن ان يكون الرئيس السابق دعا الى انتخابات تشريعية ورئاسية سابقة لاوانها من اجل تجديد الثقة فيه وفي حالة فوز اغلبية اعضاء البرلمانيين المناوئين للرئيس كان عليىه اخلاقيا ه تقديم استقالته ودخول التاريخ من بابه الواسع .ان حكامنا لا يزالون يمارسون الديمقراطية بعقلية الديكتاتورية كيف يمكن التحدث عن اليمقراطية في ظل غياب التناوب السلمي على السلطة؟ لكن السيد الرئيس هل كان قادرا على اللجوء الى الشعب الذي التزم له في برنامجه الانتخابي بالاستفتاء حول العلاقات مع الكيان الصهيوني ولم يف بوعده. ثم الم يصرح الرئيس نفسه في مدينة انواذيبو بانه على يقين بانه خيب آمال الكثير من ناخبيه؟ اما "بوب دنار" عزيز فستبدي لهل الايام ما كان جاهلا. وان موعدنا الصبح اليس الصبح بقريب؟

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Pr ELY Mustapha

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Poésie de la douleur.